Le salon international de l’aéronautique et de l’espace du Bourget (SIAE 2023) vient juste de s’achever et un point s’impose pour dépasser le battage médiatique autour de l’aéronautique verdissante et vertueuse. En deux mots : les avions de 2050 volent déjà, les flottes ne se renouvellent pas si vite que cela : les avions construits il y a quarante ans sont tout juste en train de quitter le service et encore bien souvent à cause de leurs coûts d’exploitation en carburant. S’imaginer que des avions plus sobres, consommant des énergies vertes et moins bruyants vont peupler notre ciel n’est pas pour demain sans compter qu’aucun programme nouveau n’est sur les rails, actuellement nous optimisons tout au plus les appareils existants. Le trafic aérien ne va pas cesser d’augmenter, les classes moyennes de nombreux pays se développent et ont soif de voyages. Néanmoins analyser rapidement les pistes possibles pour décarboner l’aéronautique n’est pas inutile.

Impact aviation commerciale

L’aviation contribue à près de 5 % du réchauffement climatique, soit plus que le numérique. Selon une étude qui fait référence, publiée en 2020 dans la revue Atmospheric environment, les vols en avion représentent 2,4 % des émissions de CO2 à eux seuls.

Modeste au premier abord, l’impact du transport aérien sur le climat est en réalité disproportionné. Si le transport aérien était un pays, il serait classé 21e en terme de PIB, mais avec près de 700 millions de tonnes de CO2 émises en 2012, il occuperait la place de 7e pollueur au monde. C’est l’équivalent d’un pays comme l’Allemagne, ce qui est loin d’être négligeable. Cette comparaison ne tient compte que des émissions de CO2 qui sont directement liées à la consommation de kérosène – la combustion d’un kilogramme de ce carburant générant 3,16 kg de CO2. Or le transport aérien est à l’origine d’autres pollutions qui ont un impact puissant sur le climat.

  • La vapeur d’eau, causée par les avions, contribue à la formation de trainées blanches de condensation qui favorisent l’apparition de nuages cirrus qui réchauffent la surface de la Terre.
  • Les oxydes d’azote (NOx) rejetés en altitude par les réacteurs augmentent la concentration de l’ozone (O3) et du méthane (CH4) qui sont d’autres gaz à effet de serre. En prenant en compte l’ensemble de ces gaz, le transport aérien est alors à l’origine de 4,9 % du réchauffement climatique mondial. C’est donc un contributeur d’émissions de gaz à effet de serre de premier plan, qui ne concerne qu’une faible fraction de la population mondiale (de 17 à 20 %).

Elle nécessite aussi des mesures technologiques comme l’amélioration du rendement des réacteurs, de l’aérodynamisme des avions ou de l’utilisation de matériaux composites pour alléger le poids des avions neufs. Selon une étude 2015 de l’International Council on Clean Transportation, la consommation moyenne de carburant des nouveaux avions a diminué de 45 % entre 1968 et 2014 au rythme annuel de 1,3 %. Cependant, l’amélioration de la performance énergétique ne s’est pas faite de manière constante : progressant à un rythme de +2,6 % par an dans les années 1980, elle fut au ralenti pendant les années 1970 et 2000. Depuis les années 2010 à 2020, l’amélioration de la performance énergétique s’établit à 1,1 %, par an, toujours en moyenne mondiale.

Dans un contexte où le transport aérien est engagé de façon déterminée dans le tournant écologique, les études prospectives sur la décarbonation du secteur restent parfois complexes à appréhender, à analyser et à comparer. Elles peuvent donner lieu à des interprétations divergentes entre les différentes parties prenantes. L’Observatoire de l’Aviation Durable (OAD) a été créé pour rendre accessible, en un lieu unique, des données sur l’impact climatique du transport aérien. L’observatoire trouve sa raison d’être dans cette perspective d’ouverture et de partage de connaissances. Il contribue à éclairer, dans le domaine de la décarbonation, le maillage des initiatives françaises d’innovation dans les territoires.

Les options de remplacement du kérosène possibles :

Hydrogène

La combustion de l’hydrogène, on le sait ne rejette que de la vapeur d’eau mais ce gaz est moins énergétique que le kérosène et induirait une forte surconsommation dans les réacteurs. Encore faudrait-il savoir le produire et le stocker dans des conditions renouvelables ce qui n’est pas encore le cas à une telle échelle. Le transporter sous forme liquide n’est pas évident et sa liquéfaction consomme beaucoup d’énergie. Modifier les avions existants ne serait pas impossible mais concevoir des appareils façon aile volant serait plus sage : mais il faudra plusieurs décennies.

 Carburants verts

Les biocarburants avancés, les algues, l’ammoniac et les carburants synthétiques apparaissent comme des options viables. Mais il faudrait un investissement politique et financier massif pour dépasser le stade des prototypes avant plusieurs décennies. Le détournement de surfaces agricoles est aussi à prendre en compte.

Électrique

Si on oublie les avions de loisir ou d’écolage, des vols longs courrier en électrique ne seraient guère possibles qu’avec des piles à combustible embarquées.

Hybridation

Parmi les propositions évoquées pendant le salon, les vols hybrides sont à considérer : phases de décollage et d’atterrissage avec des carburants non polluants voire en propulsion électrique et vol en palier au kérosène ou avec un carburant synthétique : la pollution autour des aéroports serait fortement diminuée et la consommation de carburant « sale » très fortement réduite. Ce type d’approche serait facilement mis en œuvre à moyen terme.

Pour conclure : ne rêvons pas pour les 25 ans à venir, les améliorations ne se feront qu’à la marge et il ne faut pas compter sur le transport aérien civil pour enrayer le réchauffement climatique.

Date de publication : juillet 2023

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