Confrontées à des impératifs de fabrication toujours plus pointus pour pouvoir répondre à des cahiers des charges exigeants, les entreprises microtechniques doivent mettre en œuvre des démarches de management d’un nouveau type. Que ce soit l’industrie médicale ou celle du luxe, l’aérospatial ou l’automobile, l’horlogerie ou l’électronique voire les autres domaines d’application, les objectifs technologiques de qualité, de miniaturisation, de fonctionnarisation intelligente et de réduction des coûts sont omniprésents. Transformation numérique, contexte de grande incertitude, nouvelles attentes des salariés, bataille pour attirer les talents… Nombreux sont les défis qu’elles doivent affronter les obligeant à gagner en souplesse et réactivité. Mais comment ? Tout simplement en faisant appel aux nouveaux modèles de management et d’organisation. Baptisées lean durable, méthodes agiles, holacratie, entreprise libérée, organisation opale, entreprise à mission, etc., ces démarches regroupées sous le sigle « NMMO » sont en fait moins « nouvelles » qu’il n’y paraît et s’inspirent de courants anciens. C’est ce qu’explique Suzy Canivenc dans son ouvrage « Les nouveaux modes de management et d’organisation – Innovation ou effet de mode ? »(1). Ce dernier s’attache à décrire les pratiques réelles associées aux NMMO, mais aussi les embûches et points de vigilance à garder en tête lors de leur déploiement. À partir de l’étude d’une vingtaine d’organisations allant d’entreprises autogérées à des divisions de grands groupes, l’auteur a identifié six pratiques récurrentes qui caractérisent les nouveaux modèles de management et d’organisation. Cherchant à se déhiérarchiser, se « désiloter » et s’agiliser pour être plus réactives, mieux répondre aux besoins des clients et mieux satisfaire les attentes des salariés, les entreprises se tournent massivement vers ces nouveaux modèles de management et d’organisation. Si les salariés s’expriment souvent en faveur de ces nouveaux modes de travail, force est de constater qu’ils ne sont pas faciles à implanter et que les entreprises butent sur de nombreuses difficultés de conception, d’adoption ou de mise en œuvre. L’évolution vers les NMMO n’est donc pas aussi simple à mettre en œuvre qu’il n’y paraît. La montée en autonomie, les changements dans les frontières de responsabilité, la disparition des routines antérieures, les difficultés de coordination, le sentiment de chaos qui s’ensuit, peuvent entraîner une montée des risques psychosociaux ainsi que des effets de retrait ou des démissions, entachant le climat social et l’efficience, à rebours des effets espérés. Seule une approche systémique, patiente, prudente, itérative et incluant les acteurs de terrain, peut permettre d’ancrer durablement le changement et d’obtenir les bénéfices escomptés tant en termes d’amélioration continue que de respect des parties prenantes. Force est de constater qu’il existe un très large éventail dans les manières de concevoir et d’implanter ces NMMO, allant d’une simple recherche de flexibilité des équipes à la quête d’une gouvernance plus démocratique inspirée par une mission d’ordre supérieur. Il importe donc de ne pas s’arrêter aux étiquettes et de regarder, dans le détail, tant les pratiques implantées que les manières dont elles sont mises en place.
Mêmes constations pour le rapport de veille technologique réalisé par Square Research Center (2), un groupe de conseil en stratégie et organisation qui réunit neuf cabinets en France. A partir d’une analyse approfondie des écrits académiques (articles et ouvrages scientifiques, thèses, actes de colloque) relatifs aux nouveaux modes de management et d’organisation du travail, il tire des enseignements, tant théoriques que pratiques, pour améliorer le fonctionnement des entreprises. Ces constats sont mis en perspective dans le contexte actuel qui a vu apparaître et s’étendre de nouvelles formes organisationnelles autorisées par les technologies numériques (plateformisation, travail à distance) et les nouvelles formes d’entreprises (organisations étendues). Le rapport pointe les incertitudes et les verrous auxquels les organisations et les responsables d’entreprise sont confrontés, qui les empêchent de saisir et maîtriser les nouveaux modes de travail ainsi que les innovations managériales.
(1) « Les nouveaux modes de management et d’organisation – Innovation ou effet de mode ? », par Suzy Canivenc, Presses des Mines, Prix : 22 euros en édition papier, 14 euros en édition PDF
(2) Nouveaux modes de management et d’organisation dans le contexte des entreprises étendues (Square Research Center)
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